Régime auto-entrepreneur (ou micro-entreprise), avantage ou inconvénient ?
Publié le dimanche 9 janvier 2022

La loi française propose aux créateurs d'entreprise un statut simplifié, celui d'auto-entrepreneur, récemment renommé « Micro-entreprise », offrant, en apparence au moins, plusieurs avantages tentants. Néanmoins, ce statut pose d'importantes questions, auxquelles il est important de répondre avant tout choix, plus ou moins définitif :

-      Ce statut est-il plus favorable dans tous les cas ?

-      Quelles sont les alternatives adaptées ?

-      Est-il possible de changer de statut si l'on s'est trompé. Si oui, comment ?


Faut-il, ou pas, opter pour le régime Micro-Entreprise ?

Avant de répondre à cette question, il convient de s'interroger sur les spécificités propres à la « Micro-entreprise ». Depuis sa création, ce régime particulier s'adresse aux très petites entreprises, avec des limites de tailles définies par leur Chiffre d'Affaire (CA), en leur proposant des règles administratives, sociales et fiscales simplifiées et allégées. Pour résumer :

  • La micro-entreprise n'a pas d'obligation de tenir une comptabilité (hormis un journal de ventes).
  • Les charges sociales du chef d'entreprise sont proportionnelles à son Chiffre d'Affaire (22% pour les prestations de services et 12,8% pour les activités d’achat/revente ou de production).
  • Le Chef d'Entreprise est imposable à un taux forfaitaire sur son Chiffre d'Affaire (impôt sur le revenu compris entre 1% et 2,2% du CA, selon l'activité, si option pour le mode libératoire) ou calculé sur une base réduite (après abattement de 34% à 71% du CA).

Attention : Selon son niveau de CA, la micro-entreprise peut aussi bénéficier d'une « franchise de TVA », cependant cet « avantage » n'est pas spécifique à la micro-entreprise (tous les autres statuts, commerçants, libéraux, SARL, SAS... peuvent aussi en bénéficier). Le sujet de la franchise de TVA n'est pas abordé ici, car il est traité en détail dans l'article intitulé « Franchise de TVA ».

 

ABSENCE de COMPTABILITÉ : Avantage ou Leurre ?

Pour le créateur débutant, savoir qu'il n'aura pas à tenir une comptabilité lourde et rigoureuse constitue certes une facilité de gestion évidente.

Se dispenser de rémunérer un professionnel (expert-comptable ou autre gestionnaire) permet d’ailleurs une économie substantielle.

Il faut cependant s'intéresser à la conséquence principale de cette absence d'enregistrement comptable : les dépenses effectuées par la micro-entreprise ne seront jamais prises en compte dans la détermination de son bénéfice, et donc des bases de calcul des charges sociales et fiscales.

En effet, en Micro-entreprise, ces cotisations et impôts seront calculés sur la base du Chiffre d'Affaire exclusivement (d'où la tenue d'un unique Livre des Ventes) et non sur la base du bénéfice réel ou de la rémunération versée, comme dans une entreprise classique.

De cette règle, on devine qu'une micro-entreprise soumise à de très faibles dépenses (peu d'achat de matières premières ou marchandises et peu de frais de structure) sera avantagée par le régime « micro » ; alors que celles dont les charges (achats et frais de fonctionnement) représentent une part importante de leur CA pourront être désavantagées par ce régime « Micro ».

À la limite, le gérant d'une Société dont les charges (achats loyers …) serait égales à son CA, faisant un bénéfice nul, paierait un impôt nul, et des charges social au minimum, alors que la même entreprise sous le statut « micro » serait quand même assujettie à des charges sociales et des impôts proportionnels à son CA.

Il importe donc, avant d'opter pour le statut « Micro-entreprise », d'analyser son bénéfice potentiel réel, en fonction de son type d'activité, puis de comparer, à l'aide d'un simulateur, les cotisations sociales et impôts payés dans les deux cas. Il conviendra aussi d'estimer les éventuels surcoûts liés au fonctionnement d'une entreprise classique, en comparaison de ceux, minimes, en « micro-entreprise ».

 

LES COTISATIONS SOCIALES en MICRO-ENTREPRISE

En règle générale, le créateur d'entreprise est soumis aux paiements de cotisations sociales lui assurant une couverture sociale, plus ou moins complète, selon son statut. Les règles, et, par conséquent, le montant de ces cotisations varient selon le type d'entreprise et la rémunération du chef d'entreprise.

Pour résumer, un commerçant paiera, en général, moins qu'un Président de SAS percevant un salaire équivalent. Le taux global de ces cotisations, par rapport au revenu net perçu, sera compris entre 35% et 100%.

Mais il est trompeur de comparer ces taux avec ceux d’un auto-entrepreneur (12,8% ou 22% selon l’activité) car l’assiette de calcul s’applique sur son Chiffre d’Affaire et non pas sur son revenu net après déduction de ses charges. Or son Chiffre d'Affaire est en général très supérieur à ce revenu net.

Exemples : Votre CA annuel est de 60 000 dont 40 000 en services et 20 000 en achat/revente et vos charges sont de 13 000.

-       Si vous êtes immatriculé en tant que profession libérale, vos cotisations sociales seront égales à 13 200 qui correspond à 60 000 * 22%.

Compte tenu de vos charges, votre revenu net avant impôt sera donc de 33 800 qui correspond à 60 000 – 13 200 – 13 000. Votre taux de cotisation réel basé sur votre revenu net sera donc d’environ 39% (13 200 / 33 800)

-       Si vous êtes immatriculé en tant que commerçant ou artisan, vos cotisations sociales seront égales à 11 360 qui correspond à 20 000 * 12,8% 40 000 * 22%.

Compte tenu de vos charges, votre revenu net avant impôt sera donc de 35 640 qui correspond à 60 000 – 11 360 – 13 000. Votre taux de cotisation réel basé sur votre revenu net sera donc d’environ 31,8% (11 360 / 35 640)

Le simulateur Optirev.fr vous permet d'évaluer ces cotisations sociales selon les différentes hypothèses de statuts d'entreprise. À noter que certains statuts d'entreprise (SA ou SAS, en particulier) permettent de distribuer une part du revenu sous forme de dividendes avec un taux de CSG de 17,2%, encore inférieur aux 22% des activités de service d’une Micro-entreprise.

Enfin, n'oublions pas que ces cotisations sociales correspondent, pour la plupart, à des « revenus différés » qui seront perçus lors de certains accidents de vie (indemnités journalières de maladie, indemnités d'incapacité) et les pensions de retraite qui sont acquis en proportion des cotisations payées. Une optimisation trop rigoureuse du montant des charges sociales payées risque, à terme, de pénaliser ces prestations et peut constituer un mauvais choix.

 

L'Imposition de la Micro-entreprise

Le statut Micro-entreprise (nouvelle dénomination de l'auto-entrepreneur) appartient à la catégorie des « entreprises individuelles » (comme les  commerçants, artisans et libéraux) qui ne sont pas assujetties à l'Impôt sur les Sociétés, mais dont le propriétaire paye, à titre personnel, l'impôt sur le Revenu en ajoutant le bénéfice de l'entreprise aux autres revenus de son foyer fiscal (éventuels salaires, revenus fonciers,...).

Il faut ici, distinguer deux cas :

1°) Si le foyer fiscal de l'auto-entrepreneur n'excède pas un plafond légal (exemple : 55 588 pour un couple en 2020), l'impôt sera perçu, en même temps que les charges sociales, sur la base du Chiffre d'Affaire réalisé (taux de 1% à 2,2% selon l'activité exercée). Cet impôt payé est « libératoire » : aucune autre somme n'est due sur le bénéfice de l'entreprise. Sur option, le chef d'entreprise peut renoncer à ce versement libératoire. Son bénéfice devient alors imposable selon le second mode.

2°) Si le revenu du foyer fiscal excède le plafond légal (ou si le créateur a renoncé volontairement au versement libératoire), le chef d'entreprise doit intégrer à sa déclaration de revenus le « bénéfice théorique » de la Micro-entreprise déterminé selon des règles forfaitaires. Ce bénéfice théorique est égal au CA de l'année diminué d'un abattement dont le taux varie selon l'activité exercée :

      Pour les professions libérales, ce taux est de 34%.

-       Pour les commerçants et les artisans

o   71% pour les activités d’achat/revente et de production

o   50% pour les activités de services

Exemples : Votre CA annuel est de 60 000 dont 40 000 en services et 20 000 en achat/revente.

-       Si vous êtes immatriculé en tant que profession libérale, votre bénéfice théorique sera égal à 39 600 qui correspond à un abattement de 20 400 (soit 60 000 *34%).

-       Si vous êtes immatriculé en tant que commerçant ou artisan, votre bénéfice théorique sera égal à 25 800 qui correspond aux abattements de 14 200 (soit  20 000 * 71%) 20 000 (soit 40 000 * 50%).

Ce bénéfice théorique ainsi calculé sera soumis au taux d'impôt selon les règles d’habituelles des différentes tranches d’impositions.

Là encore, le montant réel de l’impôt dépend d'une multitude de facteurs (CA par activité exercée, autres revenus, constitution du foyer fiscal...) et seul un simulateur puissant, tel qu'Optirev.fr, permet d'évaluer les résultats.

QUEL BILAN TIRER de ces règles complexes

Les règles de calcul des cotisations et impôts en micro-entreprise mettent en évidence plusieurs conclusions :

a) Plus votre activité requiert des dépenses faibles ou quasi-nulles, plus le mode de calcul Micro-entreprise sera favorable en comparaison d'autres statuts. À revenu égal, vous paierez moins de charges et impôts et votre revenu disponible sera donc plus élevé.

b) Au contraire, plus votre activité impose des charges lourdes, de faibles marges (en particulier, si votre taux de marge est inférieur à 20%), moins le statut micro-entreprise vous est favorable. D'autant plus que, dans ce cas, vous aurez besoin d'un CA important, pour vous assurer un revenu correct et que le risque s’accroît alors de dépasser le plafond de la Micro-entreprise (176 200€ pour une activité commerciale).

Pour conclure, la micro-entreprise est particulièrement adaptée aux activités réduites (faible CA) réalisée seul (sans salarié) et générant de faibles charges (pas ou peu de loyer, frais et dépenses). Dans les autres cas, il faut, dès le départ, envisager une structure plus classique, soit sous forme d'entreprise individuelle (commerçant, artisan ou libéral), soit sous forme de société (EURL, SARL, SASU, SAS ou SA). Nous avons consacré des articles spécifiques pour vous aider dans ces choix

 

PASSER de MICRO-ENTREPRISE à un autre statut


Il est toujours possible de faire évoluer une entreprise d'un statut (par exemple Micro-entreprise) vers un autre (par exemple EURL), mais ce changement peut s'avérer administrativement complexe et coûteux. Il nécessite souvent de faire appel à un professionnel spécialisé (coût) et doit être prévu plusieurs mois à l'avance. En conséquence, mieux vaut éviter ce basculement pendant les deux premières années d'activité durant lesquelles votre développement commercial et votre activité requièrent toute votre disponibilité. Menez donc votre réflexion avant de lancer votre entreprise pour démarrer votre activité dans les meilleures conditions.

▲ Haut de la page